Qu'est-ce que le transhumanisme ? Terme barbare pour les uns, perspective d'avenir séduisante pour les autres, le transhumanisme est un mouvement international composite et une philosophie née aux USA durant les années 80. C'est encore relativement méconnu en France. Son fondement est le suivant : l'amélioration physique et mentale de l'être humain par les sciences dans le futur.

L'idée de l'homme immortel ou surpuissant n'est pas nouvelle. La littérature et les mythes fournissent de célèbres héros, d'archétypes de surhomme ou personnages cruels dotés de pouvoirs hors du commun. Un point de vue parfois péjoratif et dystopique dans la fiction.

Penchons-nous sur le titan Prométhée. Il a osé dérober le Feu sacré de l'Olympe symbolisant la connaissance. En le donnant aux hommes, il leur a permis de s'élever de leur condition. Quel mal à s'instruire, me direz-vous ? En réalité, tout ceci est bien entendu métaphorique : on dénonce l'orgueil humain. Ce dernier peut en effet rêver de toute-puissance et s'affranchir de ses limites habituelles. Ceci n'est pas sans rappeler Lucifer sert à faire prendre conscience des dérives de l'hybris, soit la démesure et l'arrogance par rapport aux lois de la création.

Le progrès technique moderne - fulgurant depuis deux siècles avec les nouvelles branches scientifiques comme l'intelligence artificielle ou IA - permet désormais d'affirmer que rêver d'un homme augmenté, toujours en pleine santé et immortel n'est plus une utopie réservée au domaine de la science-fiction et aux geeks fan du célèbre Iron Man. Les différentes prothèses se sont grandement améliorées récemment. Les nanotechnologies (à l'échelle atomique) présentent des applications scientifiques et industrielles encore insoupçonnables et le progrès dans la connaissance génétique s'est accru. Imaginez un peu : vraisemblablement, il sera un jour possible de copier la mémoire humaine dans un ordinateur et de "l'uploader" dans un nouveau corps. La problématique de l'immortalité pourrait dès lors être résolue et a priori, il n'y aurait que des avantages.

Un scepticisme sain est nécessaire face à ces évolutions de taille, qui pourraient bouleverser notre avenir, voire nous faire sortir de notre condition pour entrer dans quelque chose d'autre. Il n'est plus ridicule de parler de cyborg (voire de post-humain) si l'amalgame homme-machine s'améliore dans un futur pas si lointain.

Pourquoi donc limiter notre enthousiasme ? Y a-t-il autre chose que des avantages et bienfaits ? Outre le fait que ces perspectives rappellent avec controverse une dystopie totalitaire née avec les meilleures intentions, on peut légitimement se douter que tous n'auront pas accès aux fameuses améliorations technologiques. Ceux qui auront les moyens pourront s'améliorer physiquement, intellectuellement, mais aussi devenir immortels.

Imaginez une société à deux vitesses comme maintenant mais encore pire : les uns sont sous-développés et font les plus basses besognes, les autres super/supra-humains administrent. Rien de nouveau, me direz-vous ? L'Humanité n'aura jamais connu de tels moyens de domination et d'exploitation, qui rappellent le système de castes du célèbre Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley, dont le frère Julian était un chantre de l'eugénisme.

Dans un monde où repérer un individu est aisé (qui a parlé de puce sous-cutanée et de traçabilité des gens ?), si de graves abus économiques, sociaux et politiques adviennent, comment une partie de la population restée "naturelle" ou abrutie pourrait se révolter ? Elle se heurterait à des êtres supérieurs et apprentis sorciers impérieux, non enclins à vouloir changer l'ordre des choses et renoncer à leurs privilèges. La question de l'éthique est prépondérante, ainsi que le danger potentiel d'une telle évolution.

Si jadis nombreux furent ceux qui craignaient les dieux, on devrait désormais craindre les petits groupes mal intentionnés voulant se prendre pour des divinités. Alors il ne s'agit pas d'être pour ou contre dans un premier temps. Il faut surtout se poser les questions essentielles et limites, comme le bien-fondé et les perspectives, sans concession.

Un monde sans humains

Lucien Cerise quant à l'ingénierie sociale

Intelligence artificielle, danger ?